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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Jean Noaro et les Sgiò du sartenais

Message  Nimu Dim 10 Mai - 1:12

Bonsoir,

Qui donc nous a déja parlé de Jean Noaro dans les lignes de ce forum ?
Cet écrivain éclairé, communiste pur et dur, nous a laissé une description de la bourgeoisie du sartenais qui n'est pas sans intérêt.
On peut se référer, par exemple à l'ouvrage suivant que certains connaissent peut être.
L'avez-vous lu ?

Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Jeanno10

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Ce texte demande éclaicissements et rectifications

Message  François Durazzo Mar 12 Mai - 23:44

Cher Nimu,
Mon objectif n'est pas de venir au secours des miens, mais de la vérité, que cela soit dit.
D'abord, ne confondons pas bourgeoisie et "noblesse", mon cher Nimu.
Par ailleurs, je n'irai pas reprocher son vécu à Noaro, ce Proprianais au nom ligure dont la famille a dû s'installer au XIXe siècle, comme bien des familles de pêcheurs, à Propriano à l'époque du développement du port qu'il décrit si bien.
En effet, ce brillant italianisme issu du peuple, s'est davantage formé sur le continent où il était entré en classe préparatoire qu'en Corse où il naquit vers 1915. Sa vision du monde est celle d'un homme formé au parti communiste, qui restera un stalinien pur et dur jusqu'à sa mort à la fin des années 68.
A côté de pages merveilleuses comme celle sur les oursins que nous donnait Nicurosu à lire sur ce forum il y a quelque temps, on trouve dans ce livre une somme d'âneries et de mensonges. Il colporte tous les préjugés et les pires ragots sur le clergé corse, comme sur sa noblesse, qu'il tente de rabaisser en stigmatisant son ignorance.
En bon communiste, il aurait pu avoir assez de finesse pour relever que les différents monuments religieux, les ponts ont souvent été construits aux frais de cette noblesse qu'il stigmatise, mais comme il ne compte pour rien la religion, il omet ce détail. Il suffit de prendre comme exemple le couvent de Sainte-Lucie-de Tallano pour en trouver une trace ancienne.
D'autre part, si les 20000 hectares de terre qu'il attribue au Sartenais étaient effectivement la propriété des seigneurs, c'est qu'ils sont les premiers occupants de cette terre et les descendants des seigneurs de la Rocca. On peut leur reprocher de ne pas avoir su l'exploiter, mais il faudrait ajouter qu'un pourcentage relativement restreint était vraiment exploitable, au vu des moyens dont on disposait jusqu'au XIXe siècle.
Par ailleurs, cette richesse en terre ne doit pas cacher le train de vie modeste de cette très noblesse, comparée aux simples bourgeois du continent ou de la péninsule italienne. A Sartène, pas de palais grandiose! Quant on lit le trousseau des jeunes filles nobles au xixe siècle de Fozzano, qu'on regarde de près les oeuvres d'art, les bijoux que possédait cette noblesse, force est de constater qu'elle était composée de seigneurs de terres pauvres, qu'elle ne s'est guère enrichie sur le dos de leurs bergers, qu'elle était affublée de kyrielles d'enfants, qui hormis une éducation soignée, un sens aigu de l'honneur, ne jouissaient pas d'une grande prospérité. Son allusion à la tuberculose est mal venue et, présentée de cette manière, on pourrait croire qu'elle a surtout touché les pauvres. Moi, dont plusieurs grands-oncles et tantes en sont morts, je suis bien placé pour vous dire que les plus riches Sartenais n'ont guère été épargnés.
Noaro semble dire que ces familles qu'il ne cite pas nommément mais qui sont les Pietri, les Ortoli, les Peretti della Rocca, les Roccaserra et les Durazzo ne se mariaient qu'entre eux. C'était souvent vrai dans une société dans laquelle la différence de culture, de comportement, de langage entre pauvres et riches était abyssale, mais ce n'est pas aussi systématique que cela. Outre la vieille noblesse héritière des famille de La Rocca, des familles plus récentes à Sartène comme les Tavera ou les Bradi, qui étaient benemeriti, dès l'époque génoise, avaient pu s'allier aux premières, et au xixe siècle dès que le niveau d'instruction s'est élevé et que du peuple sont sortis des gens cultivés, des mariages ont eu lieu. L'un de nos meilleurs exemple est celui de l'instituteur Lorenzi, lui-même fils de laboureur, marié à une Bradi de Sartène et père de l'écrivain Michel Lorenzi de Bradi.
Parmi les nombreux mensonges de Noaro, figure encore les histoires des vengeances dans lesquelles nos familles "sans honneur" auraient préféré confier leurs vendettas à des hommes de main, il suffit d'énumérer les Durazzo morts à Fozzano contre les Carabelli ou à les Durazzo et les Rocaserra qui participèrent à la Guerre de Sainte-Anne, à Sartène contre les Susina et les Ortoli pour monter que cela est faux.
Cela dit, l'orgueil nobiliaire, une fierté fondée sur le nom ont souvent suscité des comportements méprisants qui ont heurté les sensibilités à juste titre. Certes l'exploitation des plus faibles fut une réalité, comme dans toutes les sociétés féodales et il faut comprendre chez Noaro la fierté blessée de l'homme issu du peuple au nom duquel il parle.
Noaro cite comme preuve d'ignorance un document dont la moitié des signataires ne sauraient pas écrire. Il semble ignorer qu'à côté des signatures des nobles figuraient aussi celles de leurs bergers ou de leurs domestiques qu'on faisait signer.
Quant à l'exode rural, c'est phénomène qui dépasse largement le Sartenais et qui atteint au même titre la Terre du Commun qu'il cite en exemple de prospérité.
Est-ce que cela justifie ces mensonges, au moment où il écrit ce livre, en 1968, à une époque où les Durazzo comme les autres se sont déjà largement mélangés à des roturiers, sont allés parfois sur le continent ou dans les colonies vivre dans des conditions aussi modestes que les ceux qui sont les enfants de leurs bergers d'autrefois?
Cela n'est pas digne d'un intellectuel et d'un historien.
Alors, gardons le Noaro qui sait décrier si bien nos montages, nos paysages marins et nos oursinades et jetons aux orties l'historien de pacotille qui profite d'un guide à vocation touristique pour encenser ça et là ses amis communistes, et dresser de la Corse un portrait noir et sans nuances.
François Durazzo

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Tentons d''''éclaircir et de rectifier

Message  nicurosu Mer 13 Mai - 16:42

Cher Francesco,

Voici, en deux temps, ma part d'éclaircissements et de rectifications.
Laissez-moi vous dire, qu'à mon estime, vous n'y allez pas de main morte.

Parlons d'abord de Jean Noaro et réservons pour un prochain message le sujet complexe et contradictoire de la sociologie du Sartenais des siècles antérieurs, encore peu étudiée autant qu'elle le mérite et par trop victime de clichés relevant de la théologie.

C'est la première fois que j'évoque la figure de Noaro sur le forum. J'ai lu de ses livres et j'ai surtout connu certains de ses élèves de l'ancien Cours Complémentaire de Sartène, dont l'un s'appelait Antoine-Marc....

Un homme de culture, un pédagogue doué et dévoué à la cause de "l'instruction publique". Il prenait en charge, le soir à l'étude, bénévolement, les internes qui en voulaient.
Noaro était par ailleurs un militant actif de la section socialiste SFIO de Sartène, dirigée alors par son collègue, le Sartenais Jacques-Antoine Bianchini, qu'ils animaient avec vigueur et dynamisme, débordant même sur le plan syndical agricole. Il se heurtaient souvent à ce que j'appellerai pour simplifier le clan "piétriste".

Ce n'est pas à l'homme de lettres que vous êtes que j'apprendrai que lorsque l'écrivain parle de l'Autre, il parle aussi de lui-même: en évoquant le départ forcé de Nicolas Pietri de Sartène, qui bien sûr n'a rien à voir avec le clan "piétriste", Noaro parle en fait du sien propre. En butte aux menaces (et voies de fait) de fidèles du clan en question, Noaro dut lui aussi quitter Sartène contre sa volonté, comme d'ailleurs Bianchini, qui fut un temps muté à Calenzana.

Noaro participa activement à la Résistance; à la Libération, il se retrouva au cabinet de Laurent Casanova, ministre des Anciens Combattants du Général De Gaulle. Casanova eut inévitablement sa période stalinienne, mais responsable des"intellectuels" de son parti, il fut traîté d'italien, au sens politique du terme, et mis en quarantaine (ou même exclu).
Bianchini, lui, fut élu député en 1946 avec Giovoni, sur une liste socialo-communiste et, pour cette raison, exclu de son parti (effet du début de la guerre froide).

Quant à Antonio Gramsci, ce Sarde d'une immense culture, théoricien marxiste fécond et original, socialiste puis communiste, mort en 1937, dont Les Lettres de Prison sont considérées comme l'un des chefs d'oeuvres de la littérature italienne, on sait qu'il décela très tôt les dérives staliniennes, au point qu'il fut quelque peu oublié au fond de son cachot par le parti officiel.

Avouez mon cher Francesco que choisir de traduire, dans les années 70, la prose de Gramsci plutôt que l'oeuvre théorique de Marchais ne désigne pas à la vindicte comme "stalinien pur et dur".

Je précise que Nicolas Pietri fut élu en 1951 maire de Sartène, lors d'une partielle, avec l'appui de la section socialiste et de la droite, tendance Pinay. Il ne se représenta pas en 1954. Il y aurait beaucoup à dire sur les conditions de cet intermède et de son terme.
On doit à N. Pietri la création dans les années 20 du Cours Complémentaire, devenu l'actuel Lycée Clémenceau, du nom de celui dont il fut l'homme de confiance et l'exécuteur testamentaire.

A bientôt,
Nicurosu

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Peut-être pas stalinien pur et dur, vers la fin de sa vie.

Message  François Durazzo Ven 15 Mai - 10:34

Cher Nicurosu,
Jean Noaro est effectivement militant à la SFIO, mais en 1940 il entre au parti communiste. Il s’intéresse assez tôt à Gramsci, mais il se plie à la discipline du parti qui refuse jusqu’au début des années 50 la publication des traductions de Noaro aux Editions sociales. Il se soumet pendant toutes ces années à l’orthodoxie du parti Je vous invite à lire l’article qui lui est consacré dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, p. 302.
L’objectif du parti communiste français n’est pas de tirer les positions de Gramsci du côté d’une quelconque dissidence, mais au contraire de légitimer les dogmes du parti. C’est ce qui ressort de manière claire des textes de Jean Noaro lui-même, publiés dans La Pensée et Les lettres françaises à l’occasion de la parution de sa traduction. Noaro insiste sur l’orthodoxie léniniste de Gramsci à plusieurs reprises, allant au-delà du contenu des Lettres dont la portée théorique est somme toute restreinte. Ses autres traductions (Renata Vigano, Guido Deborga), ainsi que sa biographie de Palmiro Togliatti, toutes publiées aux éditions du PCF. N’oublions pas qu’à cette même époque le normalien Marc Soriano qui s’intéresse aussi à Gramsci se voit définitivement refuser par le PCF la publication des Cahiers de Gramsci, dont le contenu semble dissident.
Souvenons aussi de l’article paru dans Les lettres françaises (n° 200, 18 mars 1948) à propos du roman de Vittorini Les Hommes et les Autres, dont Noaro montre et loue l’orthodoxie.
En 1949, lorsque Noaro signe la postface de l’étude de Maurice Thiédot sur la Pologne, il est clair que Noaro soutient encore Staline. Ce n’est qu’à la fin des années 50, donc bien longtemps après la mort de Staline que Noaro commence à développer un peu son jugement critique.
Je vous recommande par ailleurs la lecture de l’ouvrage de Corinne Grenouillet, Lecteurs et lectures des communistes d'Aragon, où elle montre la manière exclusivement idéologique dont Noaro déploie son activité de critique littéraire. Il est vrai que sa traduction du livre de Giuseppe Boffa, Le grand tournant de Staline à Khrouchtchev, publié en 1960, dans lequel ce communiste italien analyse avec courage les dérives du stalinisme, semblerait montrer que Noaro a pris conscience de la barbarie stalinienne.
Alors, d’accord, je retire le mot « stalinien pur et dur » à l’époque où Noaro écrit son Voyageur de Corse et accepte que Noaro ait pris conscience vers la fin des dérives de Staline. Mais Noaro reste fidèle à l’orthodoxie communiste et à sa lecture de l’histoire, il reste convaincu jusqu’aux événements de Prague en 1968, avant sa mort, qu’il n’y a pas d’autre lecture de l’histoire que celle de la lutte des classes, et que les pages du livre que Nimu vient de mettre en ligne, transpirent la haine sociale et la mauvaise foi.
Que Noaro, jeune instituteur dévoué aux élèves méritants de Sartène, ait souffert ne l’exonère en rien de son aveuglement et de sa mauvaise foi.
Je n’ai pas développé tous mes arguments dans mon intervention précédente, mais j’aurais pu relever que Nicolas Pietri, l’ami de Clemenceau, dont Noaro fait l’éloge sous prétexte qu’il serait né dans une famille modeste de Sartène est du même parti que mon arrière-grand-père Hector Durazzo, ancien maire de Campomoro.
Alors quels que soient les faits fondés que l’on puisse faire à ceux qui ont eu le pouvoir durant des siècles, je pense qu’une histoire empreinte de la nue vérité des faits suffit à dégager les reproches qu’on pourrait leur faire et qui sont nombreux, sans qu’on en rajoute en disqualifiant son propre discours par des mensonges.
François

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Rép. à "peut-être pas ..."

Message  nicurosu Lun 18 Mai - 16:40

Cher Francescu,
Or donc le proprianais Noaro bénéficiera peut-être de la relaxe du "Tribunal du Forum"!
Il eut en effet, dans le sillage de Laurent Casanova, sa période "orthodoxe" , toute relative cependant puisque, par exemple, son travail sur Gramsci a été, comme vous le rappelez, interdit de publication pendant plusieurs années. Comme Aragon, il défendit un temps le "réalisme socialiste", puis, comme lui, il le rejeta avant de prendre ses distances dans les années 54-55.
On ne va pas épiloguer ici sur cette sulfureuse période de l'histoire, dont Gramsci est à coup sûr l'une des plus hautes figures, qu'on n'oublie d'ailleurs pas aujourd'hui.
La preuve, dans un des derniers numéros de l'hebdo Marianne, l'un de ses journalistes en vue n'écrit-il pas que "Nicolas Sarkozi est un magicien gramscien"! Comme quoi, il n'y a que les montagnes qui ne se rencontrent pas...
Dans mon premier message, j'avais voulu seulement rappeler que Noaro avait marqué - à mon sens, en bien - des générations de jeunes de notre micro-région du Sartenais-Valinco. Et du même coup, souligner le caractère foncièrement politique, au sens noble du terme, des affrontements de l'avant-guerre dans le Sartenais. Ce qui était d'un autre niveau, soit dit en passant, que les luttes picrocholines du Partitonu et du Partitellu à Corté, luttes sur lesquelles des générations d'enseignants-chercheurs de notre Université ne manqueront pas de se pencher un jour avec délectation.
Pour en finir, pour mon compte à ce propos, permettez que je cite un autre de nos poètes:

"Omini chi vinareti dopu
Pinsareti à no com'è no à vo
U sbagliu vi sarà permissu
E calchi volta u tradimentu
Ch'un sareti mai chè omini è nienti di piu"

(Hommes qui viendrez demain
Vous penserez à nous comme nous à vous
L'erreur vous sera permise
Et même la trahison
Car vous ne serez jamais que des humains)

Nicurosu

P.S.: Je reviendrai bientôt sur "La Terre des Seigneurs" tant discutée.

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Merci

Message  François Durazzo Lun 18 Mai - 23:00

Cher Nicurosu,
Je ne sais pas qui à Sartène ou sur le Continent a gardé la mémoire du fougueux Noaro. Sans doute avons-nous, vous et moi, la mémoire un peu plus longue que certains.
Certes le communisme a fait (triste record) 120 millions de morts, plus encore que la barbarie nazie, mais Noaro ne le savait pas, nous n'étions pas à l'heure des bilans, et il faisait partie de ceux qui croyaient à la fraternité humaine. Si celle-ci est un peu gâchée çà et là par sa foi en la lutte des classes, ses discours politiques et son orthodoxie, il nous reste de lui quelques pages exquises sur notre île qui sont dans la veine du meilleur Lorenzi de Bradi, comme celle de l'oursinade que vous avez naguère postée sur le forum. Pour rendre justice à Noaro et refermer ce fil de discussion imprudemment ouvert par Nimu que je soupçonne d'avoir malicieusement voulu voir si j'allais voler au secours des miens, je vais bientôt poster une de ses meilleures pages.
Que l'âme (même s'il n'y croyait pas) de Jean Noaro repose en paix !
François Durazzo

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Re: Jean Noaro et les Sgiò du sartenais

Message  umagu Mar 19 Mai - 15:46

Bonjour François. S'il était encore là,il pourrait t'en dire beaucoup celui qui s'est vu refuser deux oranges pour ses enfants alors qu'il travaillait dur à la cueillette sur des terres campomoraises. Le sujet est très glissant tu as raison de vouloir le clore.umagu.

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Quali hè stu magu?

Message  François Durazzo Mer 20 Mai - 0:01

Monsieur le magu ou le mogu,
Inutile de remuer une fois de plus la haine réciproque qui jadis a pu opposer pauvres et riches.
La méchanceté fait partie de la nature humaine, et à côté du geste mesquin qui a pu être commis par l'un des miens et qui est inexcusable, je pourrais vous citer cent gestes généreux, restés dans l'ombre, que leurs auteurs ont voulu discrets. Par ailleurs la méchanceté n'est pas l'apanage des riches, et on pourrait citer des faits peu glorieux des deux côtés. Certes, on n'exonérera jamais la classe dominante d'avoir souvent appliqué la loi du plus fort sans discernement et l'histoire, la démocratie ont eu raison de l'ancienne noblesse. Est-ce que certaine bourgeoisie d'affaires qui en deux ou trois générations est passée de la terre à la finance, se comporte mieux? La crise nous donne tous les jours des exemples du contraire. ce monde est cruel et sans pitié. On en a connu qui sortant d'une situation modeste pour une beaucoup plus enviable sont passés de la gauche à la droite, de la défense des travailleurs à celle du capital, en un éclair, et se sont bien gardés de faire partager leur nouvelle fortune avec les leurs, avec comme argument, je me suis fait tout seul, les autres n'ont qu'à en faire autant.
La question n'est donc pas de faire justice dans ce fil de discussion aux uns ou aux autres et cela ne dispense en rien les historiens comme Noaro du ton neutre, froid et objectif qui est le propre d'un esprit libre et honnête et sans haine.
François


Dernière édition par François Durazzo le Mer 20 Mai - 19:01, édité 1 fois

François Durazzo

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Re: Jean Noaro et les Sgiò du sartenais

Message  umagu Mer 20 Mai - 10:01

Il n'y aucune haine dans mes trois petites lignes.Simplement je veux rappeler que les relations d'alors étaient très loin d'être aussi roses que tu les dépeins.

umagu

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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty E PERICOLOSO SPORGERSE

Message  nicurosu Mar 26 Mai - 21:10

Cari tutti,

Revenons enfin à ce qu'a écrit Noaro sur la "noblesse sartenaise" et à la réplique musclée de notre caru Francescu.
Il doit être possible en l'an 2009 d'en parler de manière dépassionnée, distanciée, car tout cela est irrémédiablement du passé.

Tous deux sont au moins d'accord, me semble-t-il, sur trois points concernant cette entité sociale:
1/ ses conditions de vie "très modestes", sinon miséreuses;
2/ la réalité du "système d'exploitation des plus faibles";
3/ Son comportement comme manifestation de "l'orgueil nobiliaire".

On ne peut nier que le Proprianais a eu la dent dure (l'effet du souvenir cuisant de son expérience de terrain?). Dans La Corse familière qu'il avait publiée après, il a récidivé, mais il n'était pas plus tendre pour l'ensemble de ses compatriotes, parfois excessif mais souvent très percutant: "qui aime bien, châtie bien!"

Sur "l'orgueil nobiliaire", d'autres avant lui ont été bien plus féroces. Il n'est que de lire ce qu'écrivait, entre autres, le Procureur du Roi (Louis XV) en poste à Sartène en 1776, confronté, il est vrai, à une arithmétique inédite: sur presque 180 chefs de famille vivant intra muros, 120 se déclaraient ou se prétendaient "nobles".

Le titre légitimait leur comportement de praputenza (prépotence), qui n'était pas, loin s'en faut, une spécialité sartenaise. L'Immortel Dominique Fernandez, grand amoureux de l'Italie, en a souligné la dimension méditerranéenne. A propos des féodaux du Sud de l'Italie (de la Sicile, en particulier), il écrit:
"Prépotence, seul mot apte à rendre le mélange de brutalité, d'orgueil, de mépris, d'ignorance, qui a toujours enflé les riches et puissants du Midi."

Mai revenons à nos moutons: cette prépotence se fondait sur le bon fonctionnement du binome SGIO/PASTORI.

U PASTORI, ce n'était pas le "berger" au sens provençal du terme (gardien de moutons). Il se définissait négativement: il n'était ni Sgio, ni domestique, ni artisan, et il n'habitait pas intra muros (c'était le campagnard).
Son statut d'infra-humain, un propos bien connu le révèle: "C'érani trè omini e un pastori" (il y avait trois hommes et un "berger").
Le titre - que dis-je? la tache indélébile - était tacitement héréditaire: on pouvait être un philosophe spécialiste de Spinoza, de réputation internationale, on continuait d'être considéré (déconsidéré) comme pastori, si l'on avait eu un énième aïeul campagnard, n'eût-il lui-même, ni sa descendance, jamais assisté à un agnelage.

U SGIO n'était pas le "noble" au sens courant du terme qui a d'ailleurs évolué avec le temps.
Il me paraît plus juste de parler de SGIUVIZZIA que de "noblesse", vu son originalité.
Cette Sgiuvizzia n'était en effet reconnue ni par Gênes ni par les autres états, jusqu'à ce que le Conseil Supérieur de la Corse le fasse en 1772 (abolie en 1790 par l'Assemblée Nationale).
Elle n'était ni d'épée, ni de robe, ni titrée (duc, comte, baron,...); c'était un titre en soi, d'ou l'importance de son affichage.
Pour s'en prévaloir, il fallait être propriétaire foncier d'importance, avoir une conduite honorable et ne pas avoir d'activité roturière.

Avec raison, je crois, Francescu fait grief à Noaro de s'être focalisé sur la conduite de ces gens qui avaient "sproni in pédi e cavaddu à l'ortu", plutôt que de recourir à la grille marxiste d'analyse des conditions économiques de l'époque.
La propriété foncière n'est pas l'outil le plus productif de liquidités, c'est le moins qu'on puisse dire. C'est la pénurie de numéraire qui a été pour la Sgiuvizzia l'obstacle majeur à l'investissement sur ses terres (habitation, locaux pour le stockage, la stabulation,...). D'autant plus que le métayage, forme d'exploitation dominante, par son caractère de précarité (menace de non renouvellement du contrat) décourageait tout accord du binome pour un investissement partagé, même à court terme.

Francescu frappe juste également, me semble-t-il, lorsqu'il s'en prend aux incursions que fait Noaro dans l'histoire de la Corse, en Sudiste repenti.

On ne peut qu'être surpris que l'italianiste et brillant traducteur qu'il fut, reprenne la faribole de "la Terre du Commun", formule fabriquée à la fin du XVIIIe siècle, puis exploitée pour escamoter la véritable dénomination, "la Terre de la Commune de Gênes" employée par la République ligure pour désigner le Deçà des Monts (grosso modo) depuis qu'en 1358 ses "Populaires" (les futurs "Caporaux") s'étaient donnés à Gênes pour s'opposer à la primauté des Seigneurs de la Rocca (dont Gênes ne viendra à bout qu'en 1511).
Et Noaro s'enfonce dans le mythe (ou la mystification) lorsqu'il qualifie de "prospère" cette pseudo-"Terre du Commun". C'était quand même un peu la lutte du bacinu (boisseau) de blé contre le bacinu de châtaignes ...

Dire aussi que "les nobles sartenais se tinrent à l'écart du grand mouvement pour l'indépendance" est une double contre-vérité:

- Dans le Sud Paoli a traité par la voie de la négociation, à la faveur de quelques tournées seulement contrariées par des rivalités personnelles (Colonna de Bozzi et Abbatucci), mais neutralisées sans trop de peine. Les exigences constantes des notables du Sud portaient sur l'organisation économique, qu'ils voulaient autonome, de la province; elles avaient leur légitimité et Paoli les a d'ailleurs admises. Seul accroc notable, l'arrestation d'Abbatucci en 1763, mais qui s'est terminée par une réconciliation franche jusqu'à Ponte Novu où ils étaient du même côté.

- Les difficultés les plus sérieuses, les affrontements sanglants répétés, Paoli les a connus avec les Matra et nombre de pièves de la Côte Orientale, en Balagne avec son lot de scissions et de trahisons, dans le Nebbiu et le Cap où il guerroya contre Gênes et ses soutiens locaux jusqu'en 1768, année pendant laquelle les défections se multiplièrent, mais parmi lesquelles celles du Sud n'étaient pas les plus nombreuses. Ce sont pour la plupart des Sudistes qui ont couvert, après l'échec, sa retraite de Ponte Novu, en passant par Bastelica, Zicavu et Zonza, jusqu'à Porto Vecchio où il s'embarqua pour son premier exil londonien.

Soyons juste: dans la Corse familière, Noaro prend ses distances avec l'histoire de l'île en forme de catéchisme; il en dénonce nombre de bricolages et fustige "une littérature de pacotille" qui plaide, de fait, pour "un inconcevable retour vers un passé dont on poétise le misérabilisme et la barbarie".

Après les points d'accord, Caru Francescu, il me reste à donner mon sentiment sur d'autres de vos arguments qui me convainquent moins ou moins que moins.
Ce sera pour la prochaine fois: j'ai été un peu long, n'est-ce pas?

Nicurosu


Dernière édition par nicurosu le Mar 26 Mai - 23:47, édité 7 fois (Raison : suite)

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Message  François Durazzo Sam 13 Juin - 0:56

O Maè,
Je vous remercie pour cette belle réponse, argumentée, solide et probante.
Je nuancerais peut-être votre propos sur l'origine des sgiò qui ont longtemps fait la différence (somme toute artificielle) entre ceux qui descendaient ou prétendaient descendre des seigneurs de la Rocca (quitte à s'affubler d'un pompeux "della rocca"), assimilables toutes proportions gardées à une noblesse d'épée, et ceux qui n'étaient que de simples benemeriti, de noblesse plus récente, fraîchement exemptés d'impôts, ce qui n'empêchait pas ces familles qui parlaient italien, envoyaient souvent leurs enfants étudier au séminaire ou dans le meilleur des cas, dans les universités italiennes, de se marier et de se fréquenter.
Il faudrait ajouter aux nombreuses contre-vérités de Noaro:
1) sa vision du clergé corse qui reprend quelques exemples scandaleux qu'on ne peut pas généraliser, de même qu'on ne peut pas tirer aujourd'hui argument des quelques cas de prêtres qui défraient la chronique pour soutenir que le clergé n'est composé que de pédophiles.
2) l'allusion à la lâcheté des sgiò qui, plutôt que de se battre, auraient fait exécuter leurs basses besognes par d'autres. Les faits sont têtus et démentent cette accusation. Ce qui est vrai, c'est qu'on se battait entre soi Durazzo et Roccaserra contre Susini et Ortoli par exemple, mais pas directement avec les pauvres, et qu'on a parfois envoyé des subalternes se charger de punir des bergers récalcitrants. Je pourrais en citer un exemple dans une famille sartenaise.
3) L'ignorance des sgiò qui faisaient des croix sur des documents montrant qu'ils ne savaient pas écrire.
4) à propos de la manière dont les sgiò se tiendraient à l'écart des pastori et resteraient entre eux, je pense qu'il y a un sérieux anachronisme (au moins cinquante ans) à publier ces mots à la fin des années soixante, époque à laquelle la majorité des descendants des sgiò s'étaient déjà mariés avec des roturiers. Ce qui n'empêche pas le ridicule de certains de s'enorgueillir d'une "illustre ascendance" au mépris de de leurs autres ancêtres qui marchaient pieds nus.
Mais je vous attends sur mes erreurs,
François

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Message  nicurosu Mer 17 Juin - 16:46

Caru Francescu,
J’avais dit que je reviendrais sur certains de vos arguments et non sur vos "erreurs".
Voyons donc :
1/ Sur les monuments religieux :
Sauf cas particuliers, la communauté villageoise ou piévane était systématiquement sollicitée pour participer à la dépense.
Pour les ponts, chemins et tours littorales, en plus de leur contribution pécuniaire, les actifs des familles des communautés concernées assuraient des corvées périodiques de main d’œuvre et de transport des matériaux et de l’eau (les femmes en étaient souvent pour les transports).
2/ Sur l’origine de la propriété foncière :
Elle échut, dites-vous, aux. " premiers occupants " ou aux " descendants des seigneurs de la Rocca "
- " Premiers occupants ", les " seigneurs " auraient donc été des " boni ad cursum ", les premiers à être dignes de porter le patronyme BONACCORSI, en somme !
A l’aube des temps, c’est l’histoire de la poule et de l’œuf : on n’insistera pas….
Après, il y eut bien sûr les ventes et achats licites, mais aussi les appropriations résultant d’une efficiente alchimie entre des positions de pouvoir local et le bénéfice d’adjudications et fermages à caractère fiscal. En la matière, d’ailleurs, les " caporaux " cismontais n’étaient pas en reste : il faut donc bien se garder d’en faire la spécialité de telle ou telle catégorie sociale.

- " Descendants des seigneurs de la Rocca " ?
La filiation (collatérale) avec le dernier seigneur de la Rocca – Renuccio, mort en 1511 sans descendance mâle – ne peut être établie sérieusement puisque les registres paroissiaux ne sont mis en place qu’après le Concile de Trente qui s’est achevé en 1563. Vous semblez en convenir dans votre dernière intervention (Accunsentu).
3/ Sur " l’ignorance " de la Sgiuvizzia :
Sur l’époque à laquelle se réfère Noaro – le dernier quart du XVIIIe siècle – je citerai deux documents.
- Sur les cinquante nobles sartenais qui ont prête serment à Louis XV après l’annexion, quatorze ne savaient pas signer ;
- La protestation de la noblesse sartenaise, en date du 6 septembre 1790, contre la suppression des titres de noblesse par l’Assemblée Nationale comptait soixante-deux signatures dont deux croix.
Il va de soi que " bergers " et " domestiques " n’avaient pas été sollicités pour ce type de prestation.
De toutes façons, les chiffres ne sont pas terribles et il convient de les relativiser globalement et dans le détail :
Primo, ils ne concernent que des chefs de famille ; quid des autres membres ?
Secondo, on peut avoir appris à signer de son nom ou de son parafe, sans avoir connu les bancs de l’école.
Tertio, tenons surtout compte du contexte d’extrême rareté des établissements d’enseignement, même de premier niveau, pour les garçons, et de leur totale inexistence pour les filles.
Pour le niveau supérieur, il fallait franchir la mer et le Sgio, souvent père d’une famille nombreuse, ne pouvait payer les études à l’ensemble de sa progéniture.
Enfin, parlons plutôt d’illettrisme que d’ignorance : être illettré ce n’est pas forcément être intellectuellement limité
Revenons une fois encore à Renuccio della Rocca : il était illettré, si je ne m’abuse ; cela ne l’empêcha pas de croire aux forces de l’esprit (puisqu’il fut le fondateur du couvent de Tallano), mais surtout d’être un financier avisé et un fin politique qui donna du fil à retordre à Gênes. Laquelle n’en vint à bout qu’en le faisant assassiner ainsi que ceux de ses enfants mâles encore en vie, après qu’Andrea Doria, futur amiral, eut mené sa vaste entreprise de dévastations et de déplacement des populations de l’Alta Rocca..
Il y a bien quelque archaïsme à vouloir fustiger cet illettrisme d’avant l’Ecole de la République.
4/ Sur la consanguinité :
C’est bien vrai qu’elle n’est plus d’actualité. Mais à ce propos, deux points sont à rectifier :
- Les Benimeriti étaient des personnes, nobles ou non, dont Gênes avait reconnu les états de service en sa faveur ; la distinction s’accompagnait d’exemptions fiscales.
Bien des nobles revendiquaient ce titre héréditaire dès lors qu’ils croyaient pouvoir prétendre qu’il avait été porté par un aïeul. Il n’y avait donc pas les nobles et, au dessous, les benimeriti.
Quant aux familles " plus récentes " de Sartène, elles venaient de Terre ferme ou de la région d’Ajaccio et n’ont pu compter qu’exceptionnellement, parmi les ajacciennes, un benimerito .
Il s’agissait pour la très grande majorité d’artisans (maçons, maîtres maçons, menuisiers, ferronniers, bouchers,…) et de négociants, en grains et en bestiaux ou en produits manufacturés d’importation, d’apothicaires, de " chirurgiens ", de titulaires de charges publiques (notaires,…). Leur activité leur assurait une aisance financière enviée : c’était le sésame des alliances matrimoniales aux marges. C’est ce qui s’est produit à une toute autre échelle avec la noblesse du continent français, infiltrée par les grands bourgeois acquéreurs des anciennes terres féodales.
- Vous citez les Tavera et les Bradi comme familles installées plus récemment à Sartène ;
C’est bien le cas pour les Tavera, famille de négociants aisés venus de la région d’Ajaccio et dont nous avions longuement parlé dans la rubrique " Campomoro ".
Mais c’est faux pour les Bradi. C’est en fait une vieille famille sartenaise. Son ancêtre le plus lointain connu est un certain Susino qui a vécu à Sartène au tout début du XVIe siècle et dont descendent aussi diverses branches des Susini (certaines ayant été reconnues nobles par le Conseil Supérieur de la Corse réuni à Bastia en 1772).
Le nom Bradi a été adopté vers 1750 par ladite branche issue de Susino; en 1769 on comptait sept familles Bradi à Sartène (pour 50 Pietri, 33 Susini ,…)
Il a déjà été longuement question de ce patronyme sur le forum. On peut y revenir mais pour aujourd’hui, eu égard à ce que vous avez écrit, je veux insister en conclusion sur le fait que les Bradi comptent parmi les plus vieilles familles sartenaises.
Caru Francescu, j’avais omis de signaler que, comme vous, je trouve excessif le propos de Noaro, sur les " hommes de mains ". J’y reviens puisque vous en reparlez.
La structure clanique générait des solidarités verticales : agression ou vendetta, directe ou par délégation, c’était – c’est ! – question de circonstance.
Je me demande cependant si Noaro ne focalise pas sur " l’honneur " à la sauce mériméenne… Ce qui relève d’une autre problèmatique, qu’on pourrait aborder, mais pas seulement à deux.
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Jean Noaro et les Sgiò du sartenais Empty Escamotage des "terres communes"

Message  Nimu Sam 20 Juin - 23:51

Bonsoir Umagu, Nicurosu et François Durazzo,
Bonsoir à tous aussi,

Je puis confirmer ce que dit Nicurosu ici :

nicurosu a écrit:
2/ Sur l’origine de la propriété foncière :

Après, il y eut bien sûr les ventes et achats licites, mais aussi les appropriations résultant d’une efficiente alchimie entre des positions de pouvoir local et le bénéfice d’adjudications et fermages à caractère fiscal. En la matière, d’ailleurs, les " caporaux " cismontais n’étaient pas en reste : il faut donc bien se garder d’en faire la spécialité de telle ou telle catégorie sociale.


Cette « grande spoliation » a bel et bien eu lieu.

On en trouve d’ailleurs des traces dans les deux cartes suivantes sur lesquelles deux parties du territoire communal (respectivement sections C1 et C2) sont classées « terres communes ».

Par un tour de passe-passe qu’on peut situer chronologiquement aux environs des années 1850-1860, les Sgiò campomorais de l’époque se sont appropriés une grande partie du territoire communal.

Que les descendants de ceux-ci, dont tu es, François Michel, ne se sentent pas offusqués, ce n‘est là qu’un fait historique et non une attaque contre telle ou telle partie de notre communauté.

Il est intéressant de remarquer que l’opération a été réalisée à l’époque de la formation de la Commune de Belvédère Campomoro, par réunion des enclaves de Portigliolo et Campomoro à la Commune, plus ancienne, de Belvédère.

Il ya une délibération bien connue du conseil communal de la Commune de Fozzano dans laquelle le maire taxe les bergers Simonpiétri et Secondi de populations « nomades s’attachant tantôt à la glèbe d’un propriétaire tantôt à celle d’un autre ». L’argument était essentiel pour les exclure du partage des terres communes de Campomoro. Celles-ci, c’est clair, étaient directement issues de la séparation de la mère commune de Fozzano.


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Message  nicurosu Jeu 25 Juin - 18:19

Caru Nimu,
Tu cites ci-dessus l'un de mes propos sur "l'origine de la propriété", dans lequel je ne fais que reprendre ce que disent les historiens de la combinaison entre positions de pouvoir local et bénéfices d'adjudications à caractère fiscal, qu'ils observent en tous lieux pour les temps où la collecte de diverses formes d'impôts était privatisée.
Pour ce qui concerne la Corse, ce système de collecte a eu cours du temps de Gênes. Mis à mal à partir de 1730 sous les "Révolutions de Corse", mais, surtout, sous le généralat de Paoli, ce système fut aboli en 1769 avec l'annexion française.
"L'alchimie" dont j'ai parlé fut de plus grande efficience dans le Nord, où des "va-nu-pieds", devenus "Caporaux", purent se catapulter à la tête de vastes domaines, comme, par exemple, du côté d'Aleria et en Tavagna .Elle agit plutôt aux marges dans le Sud en permettant à des notables, déjà propriétaires, d'élargir leur assise foncière (par allargassi).
Au temps des petits et grands accommodements avec Gênes, c'est-à-dire avant 1769, cette "alchimie" a-t-elle connu quelque point d'application sur la partie de territoire de notre chère commune qui constituait alors un hameau de Fozzano? Je l'ignore.
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Message  Nimu Sam 27 Juin - 0:31

nicurosu a écrit:Caru Nimu,
Tu cites ci-dessus l'un de mes propos sur "l'origine de la propriété", dans lequel je ne fais que reprendre ce que disent les historiens de la combinaison entre positions de pouvoir local et bénéfices d'adjudications à caractère fiscal, qu'ils observent en tous lieux pour les temps où la collecte de diverses formes d'impôts était privatisée.
Pour ce qui concerne la Corse, ce système de collecte a eu cours du temps de Gênes. Mis à mal à partir de 1730 sous les "Révolutions de Corse", mais, surtout, sous le généralat de Paoli, ce système fut aboli en 1769 avec l'annexion française.
"L'alchimie" dont j'ai parlé fut de plus grande efficience dans le Nord, où des "va-nu-pieds", devenus "Caporaux", purent se catapulter à la tête de vastes domaines, comme, par exemple, du côté d'Aleria et en Tavagna .Elle agit plutôt aux marges dans le Sud en permettant à des notables, déjà propriétaires, d'élargir leur assise foncière (par allargassi).
Au temps des petits et grands accommodements avec Gênes, c'est-à-dire avant 1769, cette "alchimie" a-t-elle connu quelque point d'application sur la partie de territoire de notre chère commune qui constituait alors un hameau de Fozzano? Je l'ignore.
Nicurosu

Bonsoir Nicurosu,

Il ne m'avait pas échappé que tu ne faisais pas référence au cas de notre commune.
J'ai toutefois saisi l'occasion pour évoquer un épisode méconnu de l'histoire campomoraise du XIXéme siècle.
En relisant mon message je trouve que j'y suis tout de même allé un peu fort.

Je corrige donc mes propos:

Ce qui est choquant ce n'est pas que les "bergers" Simonpiétri, Secondi et autres aient été exclus du "partage" car, pas plus que les "propriétaires", ils n'avaient le droit de s'approprier ces terres.

Ce sur quoi il serait plus raisonnable de discuter est le fait que ces terres aient été partagées et attribuées à des privés.
Cela constitue un abus de position dominante comme le dirait plutôt maintenant.

A te lire,
Nimu
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Message  François Durazzo Mer 1 Juil - 9:02

O Nì,
Pourrais-tu éclaircir ces points?
A Campomoro, qu'est-ce qui n'était pas terre commune?
Quel sens avait le mot "commun" juridiquement? Qui appartenait à la commune? Qui appartenait en commun aux habitants de la commune, comme une sorte d'indivision?
Est-ce que la répartition de ces terres n'est pas un moyen de doter les Durazzo, dès lors qui se séparent de Fozzano?
Qu'en est-il des terres communes de Fozzano? Subissent-elles le même partage?
Ce qui au regard du droit français pourrait paraître avec un bel anachronisme un "abus de bien sociaux", ne serait-il pas plutôt une manière d'achever le passage d'une conception de la propriété issue de l'époque génoise, pendant laquelle les familles possédaient en commun un territoire donné, sans que telle ou telle parcelle soit spécifiquement la propriété d'un tel ou un tel?
Il faudrait aller plus en se posant la question de savoir sur quelle base juridique les communes se forment en France.
Car si l'on met dans le pot communal des terres qui appartenaient en commun à des familles par une sorte de tour de passe-passe juridique, on pourrait voir dans ce que tu appelles "appropriations" la réparation d'une spoliation, n'est-ce pas?

On dit que les querelles qui ont agité Fozzano dans les années 1830, ne seraient pas étrangères à ces partages de terre. Qu'en dis-tu?

A prestu,
François

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